La semaine sainte

La Semaine Sainte se condense en fait sur trois jours (« triduum »), appelés « saints » parce qu’ils constituent les trois étapes ultimes de la vie terrestre de Jésus : le jeudi qui commémore le dernier repas du Seigneur avec ses apôtres ; le vendredi qui nous fait revivre le chemin du Christ vers la croix et la mort, et le samedi qui nous fait veiller avec le Fils de Dieu au tombeau, dans l’attente de sa résurrection au cours de la nuit pascale.

L’enjeu de cette « triade » fut rien moins que le salut du monde entier. C’est pourquoi l’Église en fait continuellement mémoire, et tout particulièrement à chaque anniversaire de la première Pâque (le 8 avril 30 ou le 3 avril 33, dates possibles de la Passion selon les exégètes), à l’origine de nos calendriers modernes.

Le Jeudi saint

La messe du Jeudi saint, au soir, rappelle la dernière « Cène », ce repas de fête au cours duquel le Seigneur Jésus fit ses adieux à ses apôtres et leur livra la signification profonde de tout ce qu’il allait subir.

D’abord il leur lava les pieds, comme un simple domestique, leur montrant ainsi que leurs rapports les uns envers les autres devaient s’établir sur l’amour fraternel.

Puis, en prenant du pain et du vin pour son corps et son sang, il leur donna l’ordre de faire ainsi mémoire de lui à l’avenir. Les chrétiens croient que, ce soir-là, le Christ fonda lui-même le sacrement de l’eucharistie, par lequel il se donne en nourriture aux croyants, et le sacrement de l’ordre, par lequel il consacre les prêtres serviteurs de l’Église.

« Cette messe fait donc mémoire de l’institution de l’eucharistie, ou du mémorial de la Pâque du Seigneur, qui perpétue parmi nous, sous les signes du sacrement, le sacrifice de la loi nouvelle ; elle fait mémoire aussi de l’institution du sacerdoce, qui perpétue la mission du Christ et son sacrifice dans le monde ; elle fait mémoire enfin de l’amour dont le Seigneur nous a aimés jusqu’à la mort… » (Cérémonial des évêques, n°297).

Le Jeudi saint célèbre ainsi l’anniversaire de tous les communiants, des diacres et des prêtres (sans compter les évêques et le premier d’entre eux !).

Le Vendredi saint

Ce vendredi-là, « à partir de midi, l’obscurité se fit sur toute la terre… Vers trois heures, Jésus cria d’une voix forte : ‘Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?’ … Et poussant de nouveau un grand cri, il rendit l’esprit » (évangile de saint Matthieu 27, 45-50).

Au cours des offices de l’après-midi et du soir, les chrétiens sont invités à méditer sur la passion de leur Seigneur, à vénérer la croix par laquelle est venu leur salut, à se souvenir que l’Église est née du côté du Christ ouvert par une lance, et à prier longuement pour le monde entier. Le jeûne traditionnel de ce jour n’est qu’une manifestation concrète de nos sentiments de regret et de tristesse en face de l’Innocent crucifié pour nous.

« On lit solennellement et solennellement on honore la passion de Celui dont le sang a effacé nos péchés, afin que ce culte annuel ranime plus vivement nos souvenirs […] Comme il n’y a pas eu de contrainte et que tout a été volontaire dans ce qu’il a enduré en sa chair mortelle, on croit avec raison que dans les circonstances de sa passion dont il a fait consigner le récit dans l’Évangile, il a voulu encore indiquer autre chose.

D’abord, si après avoir été condamné à être crucifié, il a porté lui-même sa croix, c’était pour nous apprendre à vivre dans la réserve et pour nous montrer, en marchant en avant, ce que doit faire quiconque veut le suivre. Du reste il s’en est expliqué formellement. ‘Si quelqu’un m’aime, dit-il, qu’il prenne sa croix et me suive’ » (Saint Augustin, Sermon 218 pour le Vendredi Saint).

Le Samedi saint et le temps du mystère pascal

Pendant toute la journée, l’Église demeure près du tombeau de Jésus et médite sa passion et sa mort. Mais, au cours de la nuit, elle est invitée à vivre l’attente de la résurrection de son Seigneur dans la joie et l’émerveillement.

Tout d’abord, autour du feu nouveau et de la flamme du cierge pascal, les chrétiens accueillent la lumière du Ressuscité qui vient éclairer le monde. Puis ils écoutent plusieurs textes de la Bible et méditent ainsi sur les grandes étapes de la révélation de Dieu. Ils célèbrent le baptême de nouveaux croyants et renouvellent les engagements de leur propre baptême, lorsqu’ils ont été plongés dans la mort du Christ pour vivre avec lui d’une vie nouvelle. Enfin, ils offrent l’eucharistie du Seigneur Jésus qui annonce le grand banquet final, lorsque Dieu rassemblera tous les peuples dans son Royaume.

Quand ils ressortent de cette célébration, « la mère de toutes », les chrétiens ont un peu plus conscience d’être, ici et maintenant, témoins et acteurs de l’histoire du salut du monde.

« Le Christ a accompli l’œuvre de la rédemption des hommes et de la parfaite glorification de Dieu principalement dans son mystère pascal, par lequel, en mourant, il a détruit notre mort et, en ressuscitant, il a restauré la vie. Aussi le Triduum pascal de la Passion et de la Résurrection du Seigneur brille-t-il comme le sommet de l’année liturgique. De même que le dimanche constitue le sommet de la semaine, la solennité de Pâques constitue le sommet de l’année liturgique » (Vatican II, constitution sur la liturgie, n°106).

« La célébration de la Pâque se poursuit pendant le temps pascal. Les cinquante jours à partir du dimanche de la Résurrection jusqu’à celui de la Pentecôte sont célébrés dans la joie et l’exultation, comme si c’était un jour de fête unique, ou mieux “un grand dimanche”… » (Lettre circulaire de la Congrégation pour le culte divin sur La préparation et la célébration des fêtes pascales, du 16 janvier 1988).

P. Jean-Louis Angué

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