Dorothy Day. Une figure majeure du catholicisme social

Le dimanche 18 mars prochain, à 16 h, salle Sainte-Anne à Vire, aura lieu une conférence du père Dominique-Marie Dauzet de l’abbaye de Mondaye sur : « La vie de Dorothy Day ». Une grande figure du catholicisme social américain du XXe siècle. Entretien.

Qui est Dorothy Day ?
Une militante catholique américaine, dont le procès en béatification a été ouvert en l’an 2000. Elle est très connue aux Etats-Unis. Mais aussi dans le monde entier. Quand Mère Teresa arrive à New York pour la première fois, la personne qu’elle désire rencontrer, avant tout, c’est Dorothy Day. Et, en septembre 2015, lorsque le pape François intervient devant le Congrès américain, il cite 3 personnalités emblématiques du christianisme américain, dont Dorothy Day. Depuis, elle commence à être davantage connue en France.

Elle n’a pas tout à fait le profil d’une candidate à la béatification ?
Elle est née en 1897 et dans les années 1920, c’est une journaliste radicale, proche des milieux anarchistes et de l’ultra-gauche américaine. Elle est alors très amoureuse de Lionel Moise, un journaliste américain. Mais, quand elle tombe enceinte, il lui demande d’avorter. Elle raconte ce drame dans son premier roman semi-autobiographique « The Eleventh Virgin » (La Onzième Vierge), publié en 1926. Plus tard, elle rencontre Forster Batterham, un ingénieur chimiste athée. Elle donne naissance à une fille, Tamar, qu’elle décide de faire baptiser. Mais, lui, ne veut absolument pas entendre parler de tout cela ! C’est la séparation. Elle élève seule son enfant et se convertit au catholicisme. Elle relate sa conversion dans son grand livre autobiographique, publié en 1952, « The Long Loneliness » (La Longue Solitude).

Elle consacre alors sa vie aux plus pauvres ?
Ce qui va en faire une Mère Teresa, si on peut dire, c’est qu’en 1932, au plus fort de la crise économique américaine, elle rencontre un Français, Pierre Maurin, avec lequel elle fonde le « Catholic Worker Movement » (Mouvement catholique ouvrier). Dans ce journal elle prône la doctrine sociale de l’Eglise, avec un intérêt porté aux pauvres, aux marginaux, aux affamés, aux sans-abri. Tout en estimant que dénoncer la pauvreté ne suffit pas. Si les gens ont faim, il faut leur donner à manger !

Elle distribue donc des soupes populaires…
Oui. Elle ouvre la « Soup line » (soupe populaire) dans les locaux du journal. Elle va ainsi nourrir des milliers de personnes durant des années. C’est le côté multiplication des pains. Elle achète une maison plus grande et des milliers de nuitées sont accordées aux plus démunis, grâce à son association. Elle crée également les « Houses of Hospitality » (Maisons de l’hospitalité), qui existent encore aux Etats-Unis et dans le monde entier. Elle a mis en application l’Evangile : « Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais étranger, et vous m’avez recueilli. » C’était son grand souci : pénétrer au cœur du message évangélique et non pas uniquement faire de la théologie toute sa vie…

Elle se place du côté des démunis ?
L’autre aspect qui me touche énormément, c’est que, pour elle, Jésus c’est l’amour sans discrimination. Cela transperce les barrières sociales. Elle citait l’archevêque de Chicago, George William Mundelein, qui affirmait : « Trop souvent l’Eglise a choisi le mauvais côté. » Elle voulait être du côté des démunis. Dans les années 1930, 1940 et 1950, elle proteste souvent contre la pauvreté et se retrouve en prison. Elle a donc payé de sa personne. Tout en conservant une grande fidélité à l’Eglise. Même si, parfois, son catholicisme est un peu dérangeant pour l’institution…

C’est un exemple de vie éminemment chrétienne ?
Elle est décédée en 1980. Rapidement, un courant s’est manifesté pour qu’elle soit donnée en exemple. Pourtant, une certaine droite américaine ne voyait pas d’un très bon œil cette femme, qui a divorcé et avorté. Mais, l’important dans les causes de béatification n’est pas la façon dont on commence dans la vie, mais bien plutôt la façon dont on finit. Regardez la vie de saint Augustin ou de Charles de Foucauld ! Tout commence par une vie un peu déréglée, un peu agitée, bref une vie de patachon. Et, soudain, Dorothy est saisie par le Christ. Sa vie est alors d’une droiture et d’une générosité exceptionnelles. Elle disait que c’était trop facile de se dédouaner de ses responsabilités sur Mère Teresa. Chacun doit être Mère Teresa… D’une certaine manière, elle refusait que l’on en fasse une icône. Mais en mars 2000, le cardinal John o’Connor de New York, a formellement annoncé l’ouverture du procès de béatification de Dorothy Day, estimant que Dorothy Day était un exemple de vie éminemment chrétienne…

Le dimanche 18 mars, à 16 h, salle Sainte-Anne à Vire, conférence sur Dorothy Day par le père Dominique-Marie Dauzet. Entrée gratuite. Par ailleurs, le vendredi 23 mars, salle Sainte-Anne à 19 h, se déroulera la soirée Bol de riz au profit de l’oeuvre humanitaire du père Norbert, au Burkina Faso.

(Source La Voix-Le Bocage du jeudi 8 mars)