L’Américaine Dorothy Day a évangélisé en actes !

Dimanche dernier, salle Sainte-Anne, à l’invitation du père Philippe Cenier, curé de la paroisse Saint-Jean du Bocage, le frère Dominique-Marie Dauzet de l’abbaye de Mondaye a animé une brillante conférence sur Dorothy Day (1897-1980) : une grande figure du catholicisme américain.

Devant une cinquantaine de personnes, le frère Dominique-Marie Dauzet a évoqué le parcours de cette journaliste et militante catholique américaine qui désirait « rendre visibles les invisibles », c’est-à-dire les pauvres, les marginaux, les affamés et les sans-abri. « Toute sa vie, elle a écrit ce qu’elle vivait. Des récits, des journaux intimes, des interviews, une très abondante correspondance. Mais elle n’a pas fait qu’écrire, elle a agi ! »

Cette grande figure du christianisme social est née le 8 novembre 1897 à New York. « À l’âge de 8 ans, elle a vécu le terrible tremblement de terre de San Francisco, survenu le 18 avril 1906. » Entre 250 000 personnes se retrouvèrent sans toit sur environ 400 000 habitants. « C’est une expérience fondatrice pour la petite Dorothy. » Elle écrit dans son livre autobiographique The Long Loneliness (La Longue Solitude) : « Après le tremblement de terre, tous les cœurs s’étaient élargis par charité chrétienne. Ma mère et tous ses voisins étaient occupés du matin au soir à confectionner des repas. Les gens, s’ils voulaient, pourraient prendre soin les uns des autres dans les moments de détresse, sans jugement des personnes, avec juste un peu d’amour. » À 15 ans, elle aurait voulu que chaque maison soit ouverte aux estropiés, aux boiteux, aux aveugles, comme cela s’était produit lors du tremblement de terre de San Francisco…

Alcool, avortement, tentative de suicide
À partir de 1914, elle se passionne pour les questions sociales. « Pourquoi la moitié de la planète a-t-elle faim ? » s’interroge-t-elle. À 21 ans, elle fréquente le milieu libertaire et tombe amoureuse d’un brillant journaliste américain, « ami de la boisson, des femmes et de la bagarre », souligne le conférencier. Elle tombe enceinte, il lui demande d’avorter. Elle s’exécute. Il la plaque quand même. Elle désespère, fait une tentative de suicide…
« Elle cumule Dorothy : alcool, avortement, tentative de suicide… Ce n’est pas vraiment un exemple de vie éminemment chrétienne, pour une conférence de carême, mais cela va s’arranger… » En 1925, elle rencontre Forster Batterham, un biologiste anarchiste, avec lequel il était impossible de parler religion. Elle met au monde une fille, qu’elle désire faire baptiser dans la religion catholique. Pour lui, il n’en est pas question. En 1927, c’est la rupture. Elle reçoit le baptême en même temps que sa fille.

L’Évangile au quotidien
« Dans la vie des grands saints, il y a souvent un deuxième appel qui les pousse à aller plus loin », estime Dominique-Marie Dauzet. Dans l’Amérique des années 1930, frappée par une grave crise économique, elle comprend qu’il faut changer le monde. Elle fait la connaissance de Pierre Maurin, un activiste catholique américain d’origine française, qui estime qu’il ne suffit pas d’écrire : il faut donner un toit et à manger à ceux qui ont froid et faim ! « Dès lors, elle mettra en application la parole de l’Evangile : j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli. » Elle ouvre la « Soup line » (soupe populaire), qui permettra de nourrir des milliers des personnes. Elle crée des « Houses of hospitality » (Maisons de l’hospitalité) qui existent encore aux Etats-Unis et dans le monde entier.
Si bien qu’en mars 2000, le cardinal John o’Connor de New York, a formellement annoncé l’ouverture du procès de béatification de Dorothy Day, estimant qu’elle était un exemple de vie éminemment chrétienne…

J.-Y. H